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Motoro Mase : rencontre avec Ikigami au Salon du Livre de Paris 2011

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Motorō Mase en dédicaceC’est lors de l’édition 2011 du Salon du Livre de Paris que nous avons pu rencontrer Motorō Mase, l’auteur d’Ikigami, présenté comme l’une des huit stars littéraires de l’exposition située Porte de Versailles.

Cet ambassadeur – du manga pour les néophytes et du seinen-thriller pour les connaisseurs – a tenu à faire le déplacement pour rencontrer ses fans, malgré les nombreuses catastrophes qui secouent actuellement le Japon.

Après plusieurs séances de dédicaces, c’est sur la scène centrale du salon que s’est rendu le mangaka, accompagné du rédacteur en chef du magazine Animeland, Olivier Fallaix, pour nous parler de son travail et de ses œuvres. Voici le compte-rendu de cette conférence, bonne lecture !

Pour commencer cette conférence, le public a le droit à une présentation concise d’Ikigami et vient ensuite une rapide présentation de l’auteur, où on apprend qu’avant de devenir mangaka, Motorō Mase a été designer de packaging pendant 4 ans. Il part ensuite à Londres dans une école de cinéma pour étudier les décors et les scénarios. Finalement, il débute sa carrière de mangaka en publiant deux premiers titres :

  • Kyoichi en 2001, un one-shot inédit en France, publié chez Shogakukan au Japon
  • HEADS, en 2002, une série en 4 tomes tirée d’un livre de Keigo Higashino, publié en France aux éditions Delcourt.

Les présentations étant faites, il est maintenant temps de passer aux questions :

Olivier Fallaix : Pourquoi ne pas avoir poursuivi votre voie dans le cinéma ?

Motorō MaseMotorō Mase : J’aime le cinéma depuis toujours, ce qui m’a poussé vers une école de cinéma. Cependant faire un film ce n’est pas faire un manga. Il faut savoir créer des choses dans les deux cas, mais pour un film il faut savoir gérer une équipe très nombreuse.

En plus le budget d’un film n’a rien à voir avec le budget d’un manga. Finalement je me suis dis « comme je sais déjà dessiner, pourquoi pas choisir de m’exprimer à travers le manga. »

Est-ce que devenir mangaka est quelque chose qui vous travaillait depuis longtemps, avant même de faire ces études de cinéma ?

Même si je sais bien dessiner depuis que je suis tout petit, je n’imaginais pas devenir un jour mangaka. Pourtant mes amis d’enfance me le conseillaient !

Justement, quand vous étiez plus jeune, étiez-vous un lecteur de manga vous-même ? Quels auteurs appréciez-vous à l’époque ?

Je lisais assez peu de manga quand j’étais petit. Mais je me souviens avoir lu Akira, de Katsuhiro Ōtomo, quand j’étais à l’école primaire. J’étais très surpris par la puissance des dessins de cette œuvre.

Parlons un peu d’Ikigami. La série a commencé en 2005 au Japon… Comment vous est venue l’idée de cette histoire ?

Lors de l’attentat du 11 septembre, je regardais les images en direct à la télévision. J’étais très mal à l’aise par ce que ces images n’étaient pour moi que des informations et ne me communiquaient pas beaucoup d’émotion. C’est pour cela que j’ai voulu faire une œuvre qui permet de mieux ressentir la vie… Et la mort.

Est-ce que vous pouvez nous expliquer la signification du titre Ikigami ?

Le mot gami signifie papier en japonais, d’où la carte, et iki possède un double sens : c’est un des mots japonais qui veut dire mourir mais il peut aussi signifier vivre.

La source d’inspiration pour ce titre remonte également à la seconde guerre mondiale. Il y avait au Japon une carte qu’on appelait l’akagami, un papier rouge qui était l’ordre militaire d’incorporation dans les forces japonaises.

Comme beaucoup de manga au Japon, Ikigami est prépublié dans un magazine du nom de Big Comic Spirits (Rainbow, 20th Century Boys). Que représente ce magazine pour vous ?

Big Comic SpiritsCette revue a beaucoup d’histoire, elle existe depuis longtemps et elle est représentative du genre seinen. Je suis donc très fier que mes œuvres y soient publiées. Ce format permet en plus au lecteur de découvrir l’histoire en avance par rapport au format relié.

Si on revient à Ikigami… Ce préavis de mort peut frapper n’importe qui donc comment choisissez-vous l’individu qui va recevoir l’ikigami ?

Il y a différents types de personnages… En tant qu’auteur je cherche toujours à dessiner des scènes excitantes, donc je choisis souvent des personnages qui n’ont pas réussi à  accomplir ce qu’ils voulaient dans leur vie, qui possèdent des regrets.

Parlons de Fujimoto. Est-ce que les fonctionnaires de la société japonaise contemporaine lui ressemblent ?

A mon avis, tout dépend des fonctionnaires. Mais je pense que c’est la même chose en France : c’est un métier stable, où le revenu est stable. Donc quand il faut nourrir les enfants et la famille ce côté durable est un avantage.

Fujimoto se tourmente beaucoup parce qu’il est célibataire et qu’il seul, plus qu’en raison de son statut de fonctionnaire.

Justement est-ce que les doutes de Fujimoto vont se développer davantage dans l’histoire ou préférez-vous continuer de présenter une succession de portraits de gens recevant l’ikigami ?

Je vais évidemment continuer de raconter l’histoire de jeunes gens qui reçoivent l’ikigami mais je vais aussi décrire l’évolution de l’aspect psychologique de Fujimoto. Peut-être continuera-t-il de douter ou non, peut-être décidera-t-il de se révolter…

Je suis en train d’écrire la suite de l’histoire mais pour des raisons de confidentialité je ne peux pas vous en dire davantage. ikigami-preavis-de-mort-tome-8

Vous avez créé ce manga pour que les gens prennent conscience du sens de la vie. Avez-vous vécu une expérience qui vous a permis de le faire, à titre personnel ?

À vrai dire je n’ai pas vraiment eu d’expérience personnelle qui m’a fait sentir la valeur de la vie mais en ce moment les sinistres que subit le Japon m’a fait réfléchir sur la mort et la vie.

Lors de l’attentat du 11 septembre, qui m’a inspiré, je ne me sentais pas concerné, mais les catastrophes qui se déroulent actuellement au Japon me troublent énormément.

Parlons de vos influences. Y a-t-il des auteurs de science fiction ou de thriller que vous aimeriez rencontrer ?

Concernant le cinéma, je suis un grand fan des films de Ridley Scott. Sinon, comme écrivain, il y a un romancier japonais, Kôbô Abe, qui est surréaliste et qui a écrit des romans absurdes. Sa façon étrange de raconter ses histoires m’a beaucoup influencé.

Tout à l’heure vous citiez le 11 septembre… Est-ce que vous êtes accro à l’information et est-ce que l’information a une influence sur vos histoires ?

L’actualité peut influencer mes œuvres, mais je ne suis pas pour autant accro à l’information, tout dépend des sources. Quand il y en a trop j’essaye de faire le tri et d’enlever le superflu.

Parlons du succès d’Ikigami. En France, comme vous pouvez le voir (image ci-contre), le manga a rencontré un succès aussi bien public que critique. Comment est-ce que vous vivez ce phénomène et la publication d’Ikigami en dehors-du Japon ?

Récompenses IkigamiC’est un grand honneur.

Au début du manga, envisagiez-vous un tel succès ?

Non je ne l’avais pas imaginé. Mais, lorsque que j’ai commencé ce manga, j’étais encore dans une école de cinéma à Londres et je m’étais rendu compte que certains mangas et mangakas avaient du succès… Ça fait toujours plaisir.

Et aujourd’hui, est-ce que ce lectorat étranger a une influence sur ce que vous écrivez ?

Jusqu’à maintenant non, je pensais surtout au public japonais. Mais je pense que, avec ma venue ici, je prendrais en compte le public étranger.

Vient ensuite le moment de parler de l’adaptation cinématographique d’Ikigami, sorti sur les écrans nippons en 2008 et paru en France chez Kazé l’année dernière. Pour commencer, rien de tel qu’une bande annonce :

Vous avez fait des études de cinéma donc qu’avez-vous ressenti lorsque l’on vous a proposé ce projet de film ?

Quand on m’a parlé de cette adaptation, cela m’a fait très plaisir, c’est un grand honneur. J’ai participé à l’écriture du scénario, ce qui me permettait de bien imaginer le résultat final.

Lorsqu’on est auteur, une adaptation suscite toujours un mélange de satisfaction et de peur d’une trahison de l’œuvre… De quel coté penchiez-vous ?

Au début j’étais un peu inquiet mais j’ai rencontré à plusieurs reprises le réalisateur, Takimoto, ce qui m’a complètement rassuré.

Lors de l’écriture du scénario quel a été votre rôle ? Est-ce vous qui avez choisi les chapitres et les personnages adaptés pour le film ?

J’ai donné beaucoup de conseils pour le choix des épisodes à adapter. Le manga est constitué de douze épisodes alors que pour le film, qui dure plus de 2h , on n’en conservait que trois, donc il fallait enlever beaucoup de choses. J’ai donc joué un rôle dans ce qu’il fallait garder ou pas.

Et concernant le choix des acteurs, est-ce que vous avez eu votre mot à dire ?

Motoro Mase, toujours avec le sourireNon car à ce moment là je savais que si je commençais à intervenir, la production allait devenir trop compliquée (rires), donc je me suis tu.

Depuis ce film, quand vous dessinez, est-ce que vous avez en tête le jeu de l’acteur qui interprétait Fujimoto ?

Assez peu. Le personnage de Fujimoto était déjà bien défini avant même la sortie du premier tome du manga. Donc je garde l’idée d’origine.

Abordons maintenant votre quotidien en tant que mangaka. Vous expliquiez il y a quelques mois, lors d’une interview, que vous travailliez sans assistant. Est-ce que c’est encore le cas aujourd’hui ?

Oui c’est toujours le cas.

C’est assez rare. Pour quelles raisons avez-vous fait ce choix ? N’est-ce pas trop dur ?

Big Comic Spirits est hebdomadaire mais je ne publie pas un chapitre dans chaque numéro. En réalité, je publie seulement trois épisodes par an. Cela me laisse donc le temps suffisant pour travailler seul. De plus j’ai un peu de mal à gérer les assistants. Cela me prend beaucoup de temps pour les gérer et les organiser donc je préfère travailler seul.

Quel est votre journée type ? De quelle façon travaillez-vous ?

Je ne travaille pas le dimanche. Le reste de la semaine je me lève à peu près à 14h et je travaille jusqu’à 5h du matin.

Cela fait de grosses journées…

En fait les trois dernières heures de la journée, je passe mon temps dans les bars, pour boire… (rires)

Est-ce que vous êtes le seul à décider du scénario de votre histoire ou est-ce que vous en discutez avec d’autres personnes ?

Tout au début du projet, le concept de l’œuvre n’étant pas encore totalement défini, j’ai beaucoup discuté avec mon éditeur. Mais depuis que la série a commencé, je crée l’histoire seul.

Est-ce qu’il est arrivé que vous modifiiez certains aspects du scénario au moment du dessin des planches ?

La grande ligne de l’histoire ne change jamais, mais cela peut se produire pour des détails. Durant le dessin je prends parfois conscience de contradictions et je modifie alors certaines choses.

Ikigami double page copieOlivier Fallaix propose ensuite à Mase-sensei de commenter pour le public l’une des planches d’Ikigami, que vous pouvez voir ci-contre.

Motorō Mase : Ca fait tellement longtemps que j’ai dessiné cette planche, aussi je vous demande un instant pour que ça me revienne en mémoire ! (rires)

C’est une scène dans laquelle ce jeune garçon croyait que la prise d’otage qu’il menait était retranscrite à la télévision, mais la jeune femme lui apprend que ce n’est pas le cas donc il est choqué.

Ce n’est pas évident de commenter, mais disons que j’essaye d’exagérer l’expression de chaque personnage. Par exemple dans la seconde case, si on regarde l’œil de l’homme, on peut y voir que la partie noire de l’œil est beaucoup plus petite que pour un œil réel, mais c’est pour montrer, le plus efficacement possible, la peur. C’est l’une des techniques classiques utilisées depuis longtemps dans le dessin de manga.

Pour dessiner une double planche comme celle-ci, il vous faut combien de temps ?

Une journée environ.

Pour finir, et sans bien sûr vous demander de nous dévoiler la fin de l’histoire, est-ce que vous avez en tête une idée précise de la fin d’Ikigami ?

FujimotoOui j’ai déjà décidé de la fin, il y a quelques mois.

C’est un manga que vous comptez faire durer longtemps ? Avez-vous une idée du nombre de tomes ?

Je ne sais pas combien de volumes il y aura mais, au niveau de l’histoire, on se rapproche de la fin.

Pour finir la conférence, Olivier Fallaix propose de passer le micro au public, pour recueillir quelques questions :

Bonjour monsieur Mase et merci d’être venu malgré les évènements tragiques que subit le Japon actuellement. Dans votre histoire, la loi de la prospérité nationale est un tribut du vaincu au vainqueur. Les résistants à l’ikigami ne seraient-ils pas un équivalent des japonais qui contestent actuellement les accords avec les américains ?

Tout d’abord je voudrais préciser que je n’ai jamais dit qu’Ikigami se déroule au Japon. Beaucoup me dise que c’est une histoire proche du Japon mais je parle d’un pays qui n’existe pas, qui est complètement fictif. De même, quand je parle d’un pays vainqueur, ça ne veut pas dire les États-Unis.

Comme ce manga se destine aux jeunes adultes, je voulais qu’il soit attractif pour ce public et donc réaliste. C’est pour ça que j’ai mis plusieurs faits historiques dans l’histoire d’Ikigami. Mais cela reste une histoire fictive pour adultes.

Si vous receviez vous-même un ikigami, qu’est-ce que vous feriez de vos dernières 24 h ?

Je pense que durant les trois dernières heures je vais boire à mort ! (rires) Je serais alors complètement ivre et je pourrais mourir sans peur ! (rires)

C’est ainsi que s’achève la conférence, sous les applaudissements d’un public ravi et plein de gratitude !

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